Critique de Creed 2, entre les cordes

Un film de
Steven Caple Jr.
Sortie
9 janvier 2019
Diffusion
Cinéma

Le film de boxe en est un des archétypes les plus reluisants de l’histoire du cinéma Américain avec des classiques intemporels comme Plus Dur Sera La Chute, Nous Avons Vaincu Ce Soir ou encore Raging Bull. Au pinacle de cette tradition, on trouve la saga Rocky, révolutionnaire dans le genre et pierre angulaire du cinéma populaire hollywoodien. Une saga qui s’est retrouvée à nouveau sur le devant de la scène en 2016 avec la sortie de Creed, un spin off réalisé par Ryan Coogler (Black Panther) et dans lequel le légendaire Rocky Balboa faisait son grand retour, toujours interprété par Sylvester Stalone.

Creed, l’Héritage de Rocky nous avait séduit par ses scènes de combats virtuoses et intenses et son histoire forte en émotions. C’est pourquoi le retour d’Adonis Creed en 2019, toujours épaulé par Rocky et pour faire face à Ivan Drago, l’antagoniste du mythique Rocky 4, nous avait intrigué. Le film, sobrement intitulé Creed 2, est-il à la hauteur de son héritage ?

La vie est devenue un numéro d’équilibriste pour Adonis Creed. Entre ses obligations personnelles et son entraînement pour son prochain grand match, il est à la croisée des chemins. Et l’enjeu du combat est d’autant plus élevé que son rival est lié au passé de sa famille. Mais il peut compter sur la présence de Rocky Balboa à ses côtés : avec lui, il comprendra ce qui vaut la peine de se battre et découvrira qu’il n’y a rien de plus important que les valeurs familiales.

La Rage Au Ventre

La fin du premier Creed finissait sur une émotion tendre-amer. Cette situation ambiguë, Creed 2 l’évacue excessivement rapidement. On ne revient jamais sur la maladie de Rocky pourtant importante pour son personnage alors que Creed est porté au sommet de son sport en quelques minutes. Ce postulat de départ apparaît assez paresseux et échoue à faire une liaison claire avec le précédent film, sans pour autant assumer une rupture radicale. En règle générale, l’histoire de Creed 2 est aussi convenue que possible, mais en profite pour s’attacher à des formules simples et efficaces. Incapable de surprendre par son histoire et ses retournements, tant il se repose sur une structure organique classique, Creed 2 se concentre nettement plus sur l’émotion et le développement des personnages.

L’histoire de Creed 2 en appelle également à des éléments simples et traditionnels : la famille, le courage, la persévérance, la vengeance, l’amour et la haine… Ces valeurs et ces émotions puissantes sont la colonne vertébrale du film et sont invoquées avec justesse et force, ce qui maintient le spectateur grandement impliqué à tout moment. Cette force est rendue possible d’abord par la nature presque Shakespearienne de l’histoire initiée avec Rocky 4 et qui se perpétue ici mais aussi grâce à un casting excellent : Michael B. Jordan et Tessa Thomson en tête. Ils portent largement la dimension dramatique du film et semblent parfaitement complices. Dolph Lundgren revient interpréter le patibulaire Ivan Drago qui a eu une évolution intéressante depuis Rocky 4, avec une intensité et une noirceur fort à propos, qui sait céder à de la sensibilité par moment. Enfin Silvester Stalone campe toujours le mythique Rocky, probablement pour la dernière fois. Bien que la présence de son personnage soit dispensable, c’est toujours un plaisir de voir Stalone apporter son héritage et son expérience.

Cependant la trop grande prévisibilité et paresse de l’histoire reste un défaut de taille, d’autant que certains points de l’intrigue sont assez insatisfaisants comme l’antagoniste, Viktor Drago, qui se détache trop de son père pour être perçu comme son ombre et pas assez pour s’imposer comme un personnage en soit. De même le thème de la paternité, s’il est omniprésent dans les relations entre les personnages, est abordé avec une retenue frustrante, notamment dans l’arc d’Adonis Creed et de ses débuts en tant que père.

Plus dure sera la chute

La réalisation, également, se repose largement sur ses acquis sans chercher vraiment plus loin. Ryan Coogler a été remplacé par Steven Caple Jr, un réalisateur plutôt habitué à la télévision. Il reprend les standards visuels des films de boxes : caméra épaule dans le ring, quelques plans zénithaux plus stylisés, « training montage » du héros et de l’antagoniste en parallèle… Là où le premier Creed surprenait par les performances de réalisation dans les combats, la suite ne cherche jamais vraiment à innover. Au delà de ça, les quelques fantaisies de réalisation sont en fait directement tirées d’autres épisodes de la saga Rocky. Ce manque de recherche est déplorable, même si le film ne commet pas vraiment d’impair, restant toujours clair, bien rythmé et parfaitement académique.

On déplore également les quelques séquences où le film se transforme en clip pour les chansons composées par divers rappeurs américain. Ce sont des temps morts dans l’histoire et des facilités commerciales assez affligeantes. Cependant les morceaux présentés dans ces passages, et la bande-originale du film en règle générale, sont réussis et contribuent largement à l’ambiance et à l’épique du métrage.

Creed 2 est un film académique qui ne supporte aucunement son lourd héritage. Se satisfaisant du stricte minimum narrativement et visuellement, c’est sans doute le moins original des 8 films Rocky. Cependant, s’appuyant sur une histoire certes éculée mais tout de même efficace, des personnages appréciés interprétés par de bons acteurs et des valeurs et émotions fortes, le film réussit à être toujours divertissant et à ne jamais complètement perdre son spectateur. Malgré toutes nos réticences, quand la cloche retentit, il est impossible de ne pas se lamenter des échecs d’Adonis Creed et de ne pas se réjouir de ses victoires.

3

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