Critique de Virtual Revolution : la révolution aura-t-elle lieu ?

[vc_message color= »success »]Cet article est garanti 100% sans spoiler ![/vc_message]

[vc_message color= »info »]Attention, ceci n’est pas une critique au sens propre du terme. Mon but n’est pas de faire apparaître les qualités et les défauts du film dont il est question mais simplement de partager ce qui m’a plu chez Virtual Revolution pour vous inciter à aller le voir, car Virtual Revolution a désespérément besoin de spectateurs.[/vc_message]

On ne peut pas dire que la science-fiction est le genre de prédilection du cinéma français. Alphaville (Jean-Luc Godard), Fahrenheit 451 (François Truffaut), Bunker Palace Hotel (Enki Bilal)… Il y a des films de SF français mais ils ne sont pas légion et son souvent plutôt confidentiels. C’est pourquoi, quand j’ai vu à une affiche pour Virtual Revolution, un film Français de Science-Fiction ressemblant fort à Blade Runner, je me suis dit que je ne devais surtout pas le laisser passer.

Nous allons donc de ce pas nous plonger dans le ténébreux Néo-Paris de 2047 avec Virtual Revolution !

vr-poster-low-resolutionVirtual Revolution se déroule à Paris en 2047. Si l’Homme a perfectionné la robotique, inventé des voitures volantes et conquis les étoiles, c’est la réalité virtuelle qui a réellement changé le monde. Les mondes fictifs sont devenus tellement passionnants (et surtout tellement plus excitants que la réalité) que 70% de la population ne vit plus que dans des univers virtuels, ne retournant à la réalité que pour se nourrir. On suit les aventures de Nash, un détective privé dans la vraie vie (et guerrier médiéval dans la fausse) qui est engagé par une entreprise de réalité virtuelle pour enquêter et démanteler un groupe de terroristes qui tente de pousser la population à revenir à la réalité en commettant des meurtres de masse. Instrumentalisé de toutes parts, souvent menacé, torturé par son passé… Nash aura bien du mal à tirer cette affaire au clair.

Le réalisateur derrière ce film se nomme Guy Roger Duvert. Il est aussi compositeur (il a travaillé sur Les Seigneurs d’Outre Monde, un film d’Heroic Fantasy que j’affectionne pas mal non plus) et a réalisé Cassandra, un court-métrage ayant reçu un certain succès.

Virtual Revolution est un film indépendant fait avec moins d’un Million d’euros, environ 700 000 me semble-t-il, soit, pour vous donner un ordre de grandeur, approximativement 16 fois moins que Bienvenue chez les Chtis. Et pourtant Virtual Revolution (contrairement à Bienvenue chez les Chtis) est un véritable bijou !

La première chose qui frappe le spectateur amateur de science-fiction c’est l’esthétique du film, et notamment des décors. Le film suit la même voie que Blade Runner, mêlant des éléments de décors vintages, voir vieillots, à des éléments futuristes et ultra-technologiques, ce qui donne une authenticité et une noirceur à la ville dystopique. C’est d’autant plus intéressant que le film se passe à Paris et que le panorama d’immeubles haussmanniens mêlés à de gigantesques tours futuristes cyberpunk entre lesquels circulent des voitures volantes est particulièrement impressionnant. Une nuit éternelle et une pluie qui n’en finit pas règnent sur le Paris de 2047, exactement comme sur le Los-Angeles de 2019 dans lequel se déroule Blade Runner, ce qui accentue encore la déprime ambiante, la noirceur, la décrépitude de la société. Les deux mondes virtuels qui nous sont présentés (Médiéval Fantastique à la World Of Warcraft / The Witcher et Post-Apo futuriste style Fallout / Borderland) sont eux aussi très réussis. De plus, malgré quelques incrustations parfois un peu douteuses et un éclairage un peu bizarre, les effets spéciaux tiennent bien la route (encore une fois le film a coûté 16 fois moins que Bienvenue chez les Chtis). Assez rare pour le souligner : le film a presque intégralement été tourné en décors naturels, ce qui est vraiment sympa.

 

Le scénario de Virtual Revolution est également bien ficelé. Retournements de situations, suspense, personnages énigmatiques, détestables ou attachants… Bref tout ce qu’on attend d’un film de genre…

Virtual Revolution fourmille de clins d’œil. Les influences de Blade Runner et de Metal Hurlant (magazine) se font clairement sentir. Le film fait par moment penser à Metal Hurlant Chronicles, la série de Robert Rodriguez. On peut également dresser des parallèles avec Matrix, Ubik, Ultimate Gamer, Judge Dredd, les BD d’Enki Bilal, etc… Les mondes virtuels, regorgent évidement de références vidéo-ludiques. Pour peu que vous soyez un peu geek, gamer ou fan de SF, Virtual Revolution vous fera plaisir sur ce point.

Mais Virtual Revolution brille surtout dans ses thèmes et dans la façon dont il les aborde. Il traite de la réalité virtuelle, rêve des années 80 qui commence à se concrétiser avec des dispositifs comme l’Oculus Rift ou l’HTC vive. Dans le monde du film, des chaises spéciales nous font tomber en transe et nous immergent entièrement dans l’univers fictif. La question est donc de savoir si la vie dans un « faux » monde qu’on perçoit et qu’on ressent exactement comme le vrai monde devient plus agréable que la vraie vie, est-ce bien raisonnable de délaisser totalement la réalité ? Les relations entre avatars ont-elles la même valeur que les relations réelles ? Peut-on fermer les yeux sur l’outil d’instrumentalisation politique que ça représente ? Sur la manipulation et l’abrutissement des masses ? Est-ce une vie convenable qu’une vie passée comme un légume sur une chaise ? Doit-on à tout prix être libre, même au prix du bonheur ?virtual-revolution-003-1

Virtual Revolution ne répond pas à ces questions. En effet le réalisateur nous a confié lui-même être partagé sur le sujet puisque, même si il trouve cela dommage de passer sa vie immergé dans des mondes virtuelles, il est toujours le premier à vouloir essayer ces nouvelles technologies. Volontairement le film ne nous présente pas de réels gentils et de méchants, chacun a ses arguments qui ne peuvent être contrés. Virtual Revolution ne dit pas comment il faut penser, il vous donne les outils nécessaires pour mener votre réflexion et faire votre propre choix.

Résumons un coup : on a un film ambitieux, bien réalisé, intelligent, bien écrit… Mais tout le monde devrait en parler ! Et bien en fait le problème c’est que Virtual Revolution n’est vraiment MAIS VRAIMENT PAS bien distribué puisqu’il n’est projeté que dans deux salles à Paris. La faute à un refus en masse des distributeurs pour qui « film de science-fiction français à petit budget » correspond systématiquement à un four ! C’est pourquoi, si vous habitez la région parisienne je vous ordonne d’aller voir Virtual Revolution ! Si le film continue à rencontrer le succès qu’il a connu en festival et qu’il connait maintenant en salle, on peut espérer qu’il sera plus largement diffusé à l’avenir. 

Je terminerais cet article en disant que le Guy Roger Duvert nous a partagé son envie de faire maintenant une série télévisée pour explorer les mondes virtuels qu’on n’a pas encore vu.

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